18 août 2025

Le canevas soluble



Le canevas soluble est une toile quadrillée ou imprimée, généralement en plastique ou en matière hydrosoluble, qui sert de support temporaire pour broder sur des tissus fins, extensibles ou sombres. Une fois la broderie terminée, le canevas se dissout dans l’eau. J’ai testé et c’est génial !


Le matériel :

  • Le canevas soluble

  • votre tissu de base : tote bag, linge de maison, pour moi ce sera un vieux t-shirt

  • une aiguille adaptée, non pas une aiguille à broder car trop épaisse, mais une aiguille plus fine pour bien percer le tissu

  • une paire de ciseaux et votre modèle

  • un récipient d’eau tiède savonneuse pour dissoudre le canevas une fois la broderie réalisée.

Les étapes d’utilisation :

  • Découpez le canevas à la taille du motif souhaité : optimisez un maximum car le canevas soluble est « assez » cher,

  • Positionnez le canevas sur le tissu à l’endroit désiré et n’oubliez pas d’ajouter un tissu ( style vieux drap) sous votre broderie pour la « stabiliser » : ce morceau de tissu est un support indispensable pour éviter les déformations, renforcer la tenue et assurer une broderie nette et régulière

  • fixez l’ensemble avec des aiguilles et ajoutez un cadre de broderie

  • brodez !

Lorsque votre modèle est terminé, trempez délicatement le tissu dans de l’eau tiède pendant quelques minutes ; le canevas se dissout complètement.

Sur l’envers de votre travail, il vous restera à couper les fils disgracieux et le support en trop.

Créer une grille de point de croix sans logiciel (ou presque) !

Le problème pour de nombreuses brodeuses  - et pour moi en particulier ! - est de savoir quoi faire de nos broderies…. Mais quelquefois, c’est une évidence.

Récemment, ma silhouette a connu une nette transformation grâce à une importante perte de poids. Un bonheur, certes, mais aussi un petit défi vestimentaire : que faire de tous ces vêtements que j'aime, mais qui ne me vont plus tout à fait ?

Plutôt que de les abandonner, j'ai eu une idée : les customiser avec des touches de broderie en point de croix personnalisées ! L'envie de créer des motifs uniques, parfaitement adaptés à mes goûts est devenue une évidence.

Le hic ? Je n'avais pas forcément envie de me lancer dans l'apprentissage d'un logiciel de création de grilles complexe, ni d'investir dans des outils coûteux. J’ai donc cherché une méthode plus simple, plus directe, pour transformer mes idées en motifs brodés.

C'est ainsi qu'est né ce défi : est-il possible de concevoir sa propre grille de point de croix, sans (ou presque sans) logiciel ? La réponse est oui, et je suis ravie de partager avec vous ma démarche, mes astuces et mes découvertes pour y parvenir.

C'est ainsi qu'est né ce défi : est-il possible de concevoir sa propre grille de point de croix, sans (ou presque sans) logiciel ? La réponse est oui, et je suis ravie de partager avec vous ma démarche, mes astuces et mes découvertes pour y parvenir.

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1. Première méthode à l’ancienne

Il vous faudra :

  • du papier quadrillé (les petits carreaux sont parfaits pour simuler une grille)

  • un crayon et une gomme pour les ajustements

  • des stylos de couleur pour différencier les motifs (à moins de préférer les symboles)

Pour une première fois, je vous conseille de réaliser une image simple, pour ne pas vous décourager ; si vous l’avez en tête, vous pouvez la dessiner directement sur la grille, en remplissant les cases correspondant aux points de croix. Autrement, je vous propose de rechercher un modèle « de style tatouage ».

Tracez ensuite les contours de votre dessin et remplissez les cases avec des couleurs ou des symboles pour représenter les fils de broderie. Assurez-vous que les proportions sont cohérentes pour un rendu équilibré.

N’oublier pas de scanner votre document pour en garder une copie.

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2. Seconde méthode avec GIMP

GIMP est un logiciel libre et gratuit que j’utilise déjà depuis plusieurs années ; je ne dirai pas que l’apprentissage fut difficile, il faut simplement y accorder du temps, mais me direz-vous, c’est comme tout logiciel. Aujourd’hui, je ne passe pas une journée sans l’utiliser !

GIMP est l’équivalent de PHOTOSHOP (payant) et s’approche de beaucoup à CANVA.

Vous pouvez retrouver quelques-unes de mes grilles gratuites sur mon site (ICI).

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Pour en savoir plus :

Grille point de croix personnalisée et gratuite avec Stitch Fiddle

Stitch Point- Grilles pour patron

Grille vierge point de croix - korea cute

Logiciel de point de croix - Les patrons de broderie

Crosti, logiciel de point de croix gratuit en français - Articles

17 août 2025

Rose Bertin, marchande de mode


Lorsque l'on s'intéresse à la broderie, à la couture et à la mode, un nom s'impose inévitablement :
Rose Bertin. Bien plus qu'une simple couturière - « marchande de mode » - elle est une véritable icône qui a révolutionné son époque et dont l'influence se fait encore sentir aujourd'hui.

Née dans une famille modeste, Rose Bertin a su, par son talent et son audace, s'élever jusqu'au sommet du pouvoir. Elle a fondé sa propre maison de mode, « Le Grand Mogol », et est devenue la modiste attitrée de la reine Marie-Antoinette. C'est elle qui habillait non seulement la souveraine, mais aussi toute la cour de Versailles, dictant les tendances avec une créativité sans pareille.

Mais Rose Bertin n'est pas seulement connue pour ses créations extravagantes et ses chapeaux ornés de plumes. Elle est aussi considérée comme la première grande créatrice de mode, celle qui a compris l'importance de la marque et de l'image. Elle a fait du vêtement une œuvre d'art et un symbole de statut social, transformant la simple confection en un véritable secteur économique et artistique.

Son histoire est un rappel inspirant du pouvoir de l'artisanat et de la créativité. Elle a su allier un savoir-faire d'exception à un sens aigu des affaires, laissant une empreinte indélébile sur l'histoire de la mode. Pour tous les passionnés de couture et de broderie, Rose Bertin incarne l'excellence, l'innovation et l'art de transformer le fil et le tissu en pur rêve.

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Marie Jeanne Bertin dite Rose Bertin ou Mademoiselle Bertin est née à Abbeville le 2 juillet 1747 (Archives Docésaire d’Amiens – AD 80) ; souvent surnommée la « Ministre des Modes », elle est une figure emblématique de la mode française du XVIIIe siècle.

Elle n’a que 16 ans lorsqu’elle monte à Paris et travaille comme modiste. Elle ouvre sa propre boutique, « Le Grand Mogol », rue du Faubourg-Saint-Honoré, puis rue de Richelieu. Et si j’ose dire, de fil en aiguille, elle devient LA créatrice attitrée de Marie-Antoinette, influençant profondément les tendances vestimentaires de la cour de Versailles. On pourrait la qualifier aujourd’hui « d’influenceuse ».

Elle révolutionne les silhouettes féminines mettant fin à la robe à paniers encombrante, en vogue depuis près de 75 ans, en introduisant des formes plus naturelles et légères, comme celles portées à Trianon ; elle popularise des tenues champêtres en mousseline, des robes à la polonaise, et même des vêtements de grossesse, ce qui était inédit à l’époque.

Elle invente des « looks » complets pour la reine, renouvelant sans cesse les styles pour susciter l’envie et l’imitation

Sa boutique « Le Grand Mogol » devient un laboratoire de tendances, où elle emploie des dizaines de couturières et fournisseurs ; car elle ne se contente pas de vendre des vêtements : elle crée des collections, joue sur le désir de nouveauté et impose l’idée que la mode est une signature, comme une œuvre d’art ; on peut donc la considérer comme la première créatrice de haute couture française, bien avant que le terme n’existe.

Pour la reine Marie-Antoinette, dont elle deviendra une intime, elle a créé une « robe-chemise », robe en mousseline blanche, légère et fluide, rompant avec les tenues rigides de la cour ; inspirée du style champêtre, elle était portée dans les jardins de Trianon ; mais jugée trop simple et trop intime, elle a provoqué un scandale à la cour, tout en lançant une mode plus naturelle.

Elle est à l’origine des robes à la polonaise, robes à trois pans relevés par des rubans, créant un effet bouffant à l’arrière ; inspirées du costume traditionnel polonais, elles étaient à la fois élégantes et pratiques, très prisées pour les promenades et les événements semi-formels.

Rose Bertin collaborait avec le coiffeur Léonard pour créer des coiffures spectaculaires, les coiffures « à pouf ». Ces coiffures pouvaient atteindre plus d’un mètre de hauteur, décorées de plumes, fleurs, bateaux miniatures, voire des scènes entières ; elles reflétaient les événements politiques ou les passions personnelles de la reine.

Elle incite ses clientes à renouveler leur garde-robe régulièrement, posant les bases du rythme de la mode moderne. Car Rose Bertin est la première à introduire le concept de collections saisonnières : printemps, été, automne, hiver.

Elle vendait aussi des accessoires de luxe, des manchons, brocards, jupons, broderies, et ornements pour personnaliser les tenues. Son magasin Le Grand Mogol était un véritable temple du raffinement parisien.

Sa clientèle inclut la famille royale, des aristocrates, des artistes comme Vigée Le Brun, et même des reines étrangères. En tant que modiste attitrée de la Reine, elle façonne son image publique, au point que les tenues de Marie-Antoinette deviennent des sujets de débat politique ; elle transforme la Reine en modèle vivant, ce qui contribue à la désacralisation de la monarchie mais aussi à l’essor de la mode comme langage social.

Elle est d’ailleurs demandée dans toutes les cours d’Europe, ce qui lui permet d’amasser une fortune considérable. Elle devient la première femme à diriger une corporation de mode, en 1776, et impose le style français comme référence mondiale.

Femme d’affaires influente – qui travaille avec de nombreux corps de métier - surnommée la « Ministre des Modes » par ses contemporains, Rose Bertin incarne l’ascension sociale ; issue d’un milieu modeste, elle a su se hisser auprès des « grands » ; c’est d’ailleurs une femme de tête qui ne fuira pas devant les affres de la Révolution. Critiquée pour son luxe en période de crise, elle refuse de créer des tenues « à l’égalité » ou « à la Constitution ». Elle continuera d’ailleurs à livrer des vêtements à Marie-Antoinette même après son arrestation.

Mais suivant les conseils de son « amie », après l’exécution de la reine, Rose Bertin s’exile à Londres pour fuir la Terreur ; elle reviendra en France en 1795.

Elle s’éteindra à Épinay-sur-Seine le 22 septembre 1813 (AD 93 n°23 page 9/104) dans sa propriété.

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Rose Bertin est un curieux personnage : elle incarne à la fois l’audace créative et la finesse politique dans un monde en pleine mutation. À une époque où les femmes roturières avaient peu de pouvoir, elle a réussi à s’imposer dans un monde dominé par les hommes et l’aristocratie.

Elle a profondément transformé la mode du XVIIIe siècle en la faisant passer d’un simple artisanat à un véritable instrument de pouvoir et d’expression personnelle. En ouvrant sa boutique Le Grand Mogol, elle a créé un modèle commercial de luxe, avec des fournisseurs, des couturières, et une clientèle internationale !

Elle a montré que la mode pouvait être un langage non verbal, utilisé pour affirmer son statut, ses opinions ou ses émotions, permettant notamment aux femmes de l’aristocratie de s’affranchir des codes rigides de la cour, en leur proposant des tenues plus légères, plus libres, comme la robe-chemise. Elle a encouragé une personnalisation du vêtement, où chaque cliente pouvait exprimer sa singularité, pourvu qu’elle y mette le prix...

Sa vie n’a été qu’une succession de défis, car sa relation privilégiée avec la reine lui a valu jalousies et critiques ; certains la voyaient comme une intruse dans les cercles nobles, d’autres comme une manipulatrice influente. Avec la chute de la monarchie, Rose Bertin a perdu sa protectrice et sa clientèle principale. Mais elle était une femme intelligente, au caractère affirmé voire arrogant, et a su naviguer entre loyauté et survie, tout en restant associée à l’Ancien Régime ; sa boutique a survécu un temps, mais elle a fini par tomber dans l’oubli après 1793.

À la veille de la Révolution, le luxe devient un sujet brûlant. Bertin, en tant que marchande de modes, est au cœur de cette polémique : elle incarne une bourgeoisie ascendante, capable de rivaliser avec les privilèges aristocratiques — ce qui dérange autant qu’elle fascine.

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Pour en savoir plus :

Histoire de mode : Rose Bertin, la première créatrice de mode.

BERTIN Rose - Tombes sépultures dans les cimetières et autres lieux

La maison de Rose Bertin à Epinay sur Seine

Rose Bertin | Château de Versailles

Le destin mouvementé de Rose Bertin, la couturière de Marie-Antoinettequi a révolutionné la mode

Rose Bertin : la marchande qui révolutionna la mode

Rose Bertin (FranceArchives)

"Rose Bertin: la couturière révolutionnaire qui a habilléMarie-Antoinette" - Paris Par Rues Méconnues

Rose Bertin, première créatrice de mode française

17 juil. 2025

Le blog fait peau neuve ! Il était temps.....

Après une période de réflexion, j'ai décidé de donner un nouveau souffle à mon blog. Vous l'avez peut-être remarqué, au fil du temps, mes articles ont exploré diverses facettes de mes passions. Je suis trop dispersée, mais aujourd'hui, il est temps de revenir à l'essentiel, à ce qui a toujours été le cœur de mon inspiration et de ma créativité : la broderie.

Comme beaucoup d'entre vous, je suis une passionnée de loisirs créatifs. J'aime explorer, tester de nouvelles techniques, m'aventurer sur des terrains inconnus, et mon blog a souvent été le reflet de cette curiosité insatiable. Je me suis perdue...

Pourtant, au fil du temps, cette diversité, bien que merveilleuse et enrichissante, a commencé à me submerger. J'ai eu l'impression de me noyer dans un océan de possibilités, de me disperser un peu trop, et de ne plus pouvoir approfondir chaque art comme je le souhaiterais. C'est une sensation étrange, celle d'être à la fois stimulée par tant de choix et, paradoxalement, frustrée.

Après mûre réflexion, il m'est apparu évident que mon véritable ancrage, mon fil conducteur, mon amour le plus profond parmi tous ces loisirs, a toujours été la broderie. C'est elle qui me captive, qui m'appelle, qui me permet d'exprimer ma créativité avec une intensité particulière.

Car la broderie est bien plus qu'un simple hobby ; c'est une pratique riche en bienfaits pour le corps et l'esprit ; elle favorise la détente et réduit le stress. Le mouvement répétitif de l'aiguille et du fil permet de se concentrer sur l'instant présent, créant un effet méditatif qui aide à apaiser l'esprit et à diminuer l'anxiété.

Ensuite, la broderie stimule la créativité et la patience. Chaque projet de broderie est une œuvre d'art en devenir, demandant une réflexion sur les couleurs, les motifs et les techniques. Cette activité développe la capacité à visualiser un projet fini et à le réaliser avec précision, ce qui renforce la patience et la persévérance.

La précision, la patience, et la créativité que requiert la broderie me permettent de me recentrer et de me reconnecter avec moi-même. C'est aussi un moyen pour moi de perpétuer une tradition artisanale et familiale tout en ajoutant ma touche personnelle. Dans la famille, du côté maternel, nous sommes toutes des brodeuses ; au siècle dernier, les brodeuses vivaient de cet art, mais aujourd’hui, j’ai la chance de pouvoir en faire un hobby d’exception.

La broderie offre un sentiment d'accomplissement. Voir une création prendre forme sous ses doigts procure une satisfaction immense, renforçant l'estime de soi et le sentiment de fierté. De plus, elle permet de créer des objets uniques et personnalisés, que l'on peut offrir en cadeau ou bien conserver comme des trésors personnels.

C'est pourquoi j'ai décidé de recentrer exclusivement ce blog sur la broderie. Je souhaite y consacrer toute mon énergie, ma recherche et mon partage. Mon objectif est de plonger encore plus profondément dans cette aventure textile, d'en explorer toutes les facettes, les techniques, les histoires….

En somme, la broderie à la main est une activité complète qui nourrit à la fois l'esprit, le corps et le cœur.

22 juin 2025

Une soupe aux herbes sauvages de Emilie CARLES


 Catégorie 59 : Un livre dont la couverture est verte

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Voici un livre autobiographique comme je les aime tant ! Émilie CARLES, institutrice de métier, nous plonge dans sa vie et l'évolution de la société rurale française au début du XXe siècle. Le livre est un témoignage vivant de son enfance et de sa jeunesse à Val-des-Prés, petit village de la vallée de la Clarée, région montagnarde des Hautes-Alpes.

Issue d'une famille paysanne modeste, Émilie décrit avec force et authenticité les conditions de vie difficiles de l'époque : la rudesse du travail de la terre, la solidarité villageoise, l'importance de l'entraide, la frugalité du quotidien, symbolisée par cette fameuse « soupe aux herbes sauvages » qui nourrissait les familles. Elle dépeint un monde où la nature est omniprésente, à la fois généreuse et impitoyable. (lire la suite)

11 juin 2025

Les insolents de Ann SCOTT

Catégorie 44 : Un livre dont la couverture comporte un paysage marin

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« Les insolents » d'Ann Scott, lauréat du Prix Renaudot 2023, est un roman intime qui explore la quête de sens et la réinvention de soi à l'aube de la cinquantaine.

Ce n’est pas une autobiographie, mais le livre s’inspire très largement du vécu et des réflexions de l’auteure, notamment son propre choix de quitter Paris pour un exil en Bretagne.

L'histoire suit Alex, compositrice de musique de films, qui, à quarante-cinq ans, décide de quitter Paris et ses amis inséparables, Margot et Jacques. Fatiguée de l'agitation et de l'absurdité de la vie contemporaine, elle choisit de s'installer dans un coin du Finistère, au milieu de nulle part, espérant y trouver la solitude et le silence nécessaires pour se réinventer.

Ce déménagement radical marque un tournant pour Alex, qui doit faire face à une nouvelle réalité : un environnement isolé, une maison très rustique, et l'absence de la vie parisienne trépidante. Le roman explore ses réflexions sur la solitude, les rêves déçus, l'amitié, l'amour et la quête de soi.

Mais alors pourquoi avoir choisi ce titre « les insolents » ? Pour l’arrogance de la rupture radicale car Alex quitte sa vie parisienne confortable, sa carrière, ses amis inséparables – pour s'installer dans une solitude quasi-totale en Bretagne ; c’est une audace à emprunter un chemin non conventionnel pour trouver un sens à sa vie.

Le roman explore la crise de la cinquantaine, un moment où l’auteure est confrontée à ses rêves déçus et à la nécessité de se réinventer : refuser la fatalité du vieillissement et de la routine, chercher une nouvelle voie malgré les doutes et les peurs, c’est une belle insolence…

De plus, dans une société où l'hyper-connexion est la norme, choisir de s'isoler volontairement et de chercher le silence est un acte presque subversif. Alex s'expose à la solitude, s'y confronte – s’y pique quelquefois - et cette démarche est une forme d'insolence envers la pression à être constamment entouré et diverti.

Bien évidemment, si vous recherchez un livre d’action, passez votre chemin ; ce roman dépeint avec acuité les défis d’un exil volontaire, des interrogations existentielles, des introspections profondes sur la façon dont on peut se déraciner pour mieux se retrouver, en plongeant dans l'inconnu et en faisant le pari de la solitude et de la nature. Poser ses valises, faire une pause et réévaluer ses priorités peuvent être indispensables pour mieux avancer….

Ce livre incite fortement à la réflexion ; le personnage d'Alex nous confronte à des questions existentielles sur la solitude choisie ou subie, le besoin de se réinventer à un certain âge, et la quête de sens dans une vie qui peut sembler vide ou décevante. Il est également une critique de notre société contemporaine, avec ses absurdités, ses superficialités, nous poussant à nous interroger sur nos modes de vie, notre rapport aux autres et aux réseaux sociaux et bien évidemment à la valeur de l’on accorde à la réussite matérielle, et tout ceci dans une écriture précise mais percutante….

2 juin 2025

L'île des oubliés de Victoria Hislop

Catégorie 7 : Un roman dont les personnages appartiennent à trois générations d’une famille

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« L'île des oubliés » (The Island) de Victoria Hislop est un roman historique qui explore les secrets de famille et l'histoire tragique de la lèpre en Grèce, sur l'île de Spinalonga.

Le récit débute avec Alexis Fielding, une jeune Anglaise, déconnectée de ses origines maternelles et perturbée par le mutisme de sa mère, Sophia, concernant son passé en Crète. Pour tenter de comprendre ce silence et de dénouer les mystères familiaux, Alexis décide de voyager en Grèce, dans le village de Plaka, sur la côte nord de la Crète, d'où sa mère est originaire.

À Plaka, Alexis rencontre Fotini, une vieille amie de sa grand-mère. C'est Fotini qui va, petit à petit, lever le voile sur l'histoire douloureuse de la famille d'Alexis, une histoire intimement liée à l'île de Spinalonga, située juste en face de Plaka.

Spinalonga fut, de 1903 à 1957, une léproserie, une colonie où étaient déportés les malades de la lèpre afin de les isoler du reste de la population. Alexis apprend avec stupeur que son arrière-grand-mère, Eleni, a été touchée par la lèpre et a été contrainte de vivre sur cette île avec d'autres malades (lire la suite).

22 mai 2025

Le Serment des lampions de Ryan Andrews

Catégorie 54 : Un livre dont la couverture comporte l'image d'un enfant

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Le Serment des lampions de Ryan Andrews est un roman graphique qui plonge le lecteur dans une aventure initiatique onirique et fantastique.

L'histoire se déroule autour d'une tradition annuelle lors de l'équinoxe d'automne : les habitants d'un village lâchent des lampions sur la rivière, qui, selon la légende, s'envolent vers la Voie Lactée. Cette année, Ben et sa bande de copains décident d'aller jusqu'au bout pour découvrir où mènent réellement ces lampions. Ils prêtent un serment, avec deux règles strictes : ne pas faire demi-tour et ne jamais regarder en arrière.

Cependant, au fur et à mesure de leur périple à vélo le long de la rivière, les amis se défilent un par un, pour diverses raisons (une soirée tacos, la peur des punitions, la crainte des monstres, etc.). Ben se retrouve alors seul, accompagné de Nathaniel, un garçon étrange que le groupe n'appréciait pas particulièrement.

C'est à travers les yeux de Ben que nous vivons le périple et les découvertes puisqu’il est le plus déterminé du groupe. Nathaniel considéré comme « bizarre » par les autres sera le seul à accompagner Ben jusqu'au bout de l'aventure. Leur relation, d'abord tendue et méfiante, évolue en une amitié profonde au fil de leur voyage. Nathaniel est essentiel car il pousse Ben à voir au-delà des apparences et à remettre en question ses propres préjugés.

Leur voyage prend alors une tournure surnaturelle. Ben et Nathaniel, initialement très différents, vont devoir apprendre à se connaître et à s'entraider. Ils rencontrent des personnages extraordinaires et parfois extravagants, comme l’ours pêcheur ou la sorcière. Leur quête les mène dans des lieux inattendus et fantastiques, les confrontant à leurs peurs et à leurs appréhensions face au monde.

D’abord très sceptique sur ce genre de roman, j’ai été très vite entraînée dans cette histoire initiatique et touchante ; c’est le magnifique récit d’un voyage de découverte de soi et d'apprentissage, mais aussi les rêves, les espoirs et les aspirations. Le roman aborde la fin de l'enfance, l'acceptation de l'inconnu, le courage et la valeur de l'amitié véritable.

J’ai adoré cet univers onirique et fantastique ; on peut le lire comme une simple distraction avec un joli conte moderne ou bien comme une allégorie de la vie elle-même ; la quête de ces enfants représente la persévérance face aux obstacles, la capacité à embrasser l'incertitude et la découverte que la destination n'est pas toujours ce que l'on attendait….



2 mai 2025

Odette Froyard en trois façons de Isabelle MONNIN

Catégorie 46 : Un livre qu'on lit juste pour son auteur.rice

Il y a quelques années, j’avais lu le roman « les gens dans l’enveloppe » et j’avoue que j’avais particulièrement aimé le livre. Pour celui-ci, je suis beaucoup plus mitigée….

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« Odette Froyard en trois façons » d'Isabelle Monnin est un roman qui retrace la vie de la grand-mère de l'autrice, Odette Froyard. À travers une enquête mêlant souvenirs, recherches historiques et fiction, Isabelle Monnin explore l'existence d'une femme ordinaire qui a traversé des périodes marquantes du XXe siècle.

Odette est née pendant la Première Guerre mondiale à Gray, en Haute-Saône, et a grandi dans un mystérieux orphelinat franc-maçon à Paris dans les années 1930. Son parcours la mène jusqu'aux horreurs du nazisme, et son histoire est marquée par le silence et l'invisibilité qu'elle a adoptés comme identité. Monnin, en pleine introspection, décide de redonner vie à cette femme en apparence sans histoire, en reconstituant son passé à partir de (lire la suite).

24 avr. 2025

Ce que je sais de toi de Eric CHACOUR

Catégorie 6 : Un roman qui cite les paroles d'une chanson

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Le Caire, dans les années 1980. Tarek, un jeune médecin égyptien reprend le cabinet médical de son père et ouvre un dispensaire dans le quartier défavorisé de Moqattam. Son destin bien tracé – notable bourgeois marié - s’en trouve bouleversé lorsqu'il rencontre Ali, un jeune homme issu de ces faubourgs précaires. Leur relation interdite pousse Tarek à l'exil vers Montréal.

Le roman est présenté en trois parties inégales :

  • Toi (pages 1 à 176), avec une narration à la seconde personne du présent, quelque peu déstabilisante au départ, car le lecteur ne sait pas qui est le narrateur ; il n’apprend son identité qu’au fil des pages,

  • Moi (pages 177 à 290), explore l’identité de Tarek, ses choix de vie, son parcours en Égypte,

  • et Nous ( pages 291 à 300) aborde les conséquences de ses décisions, son exil au Québec, et la manière dont il reconstruit sa vie tout en restant marqué par son passé.

Ce roman est tout simplement sublime ; au détour des pages, on voyage en Orient avec ses palettes de couleurs et de sublimes parfums. L’air y est chargé d’épices : cannelle, cumin, cardamome... Tout y est sensualité et mystère, comme un rêve éveillé aux portes du désert.

L'auteur Éric Chacour nous entraîne dans une symphonie sensorielle et poétique ; il nous en ferait presque oublier le côté introspectif et dramatique du roman. Car, bien que le régime présidentiel soit marqué par une stabilité relative, des tensions croissantes avec des groupes islamistes commencent à émerger ; les lois sur la moralité publique sont utilisées pour cibler les comportements jugés « immoraux », tels que la prostitution et l’homosexualité. Et pour préserver l’intégrité de sa famille, Tarek est contraint de fuir.

Eric Chacour s’est inspiré de ses racines égyptiennes et québécoises pour écrire ce magnifique roman, avec respect et courage. Il a d’ailleurs reçu

  • le Prix Première Plume 2023, récompensant les premiers romans prometteurs

  • le Prix Femina des Lycéens 2023, décerné par des lycéens pour célébrer une œuvre marquante

  • le Prix des Cinq Continents de la Francophonie 2024, soulignant la diversité culturelle et éditoriale en langue française

  • le Prix des Libraires 2024, attribuée par plus de 900 libraires indépendants.

Ces prix témoignent de l'impact et de la qualité littéraire de ce premier roman. J’attends les autres….

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Pour en savoir plus :

(338) Helwa ya baladi حلوه يا بلدي لداليدا .. Tu es beau mon pays de Dalida traduite en français - YouTube

Comprendre la maladie – Huntington (Association Huntington France / AHF)

18 avr. 2025

Happy Hyppo (2/3)

 Reste quelques petits remplissages, le contour et le montage sur un tablier japonais :


15 avr. 2025

Enfant de salaud de Sorj CHALANDON


Catégorie 52 : Un livre recommandé par un.e ami.e

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Quatrième de couverture : « Un jour, grand-père m’a dit que j’étais un enfant de salaud.

Oui, je suis un enfant de salaud. Mais pas à cause de tes guerres en désordre papa, de tes bottes allemandes, de ton orgueil, de cette folie qui t’a accompagné partout. Ce n’est pas ça un salaud. Ni à cause des rôles que tu as endossés : SS de pacotille, patriote d’occasion, résistant de composition, qui a sauvé des Français pour recueillir leurs applaudissements. La saloperie n’a aucun rapport avec la lâcheté ou la bravoure.

Non. Le salaud, c’est l’homme qui a jeté son fils dans la vie comme dans la boue. Sans trace, sans repère, sans lumière, sans la moindre vérité. Qui a traversé la guerre en refermant chaque porte derrière lui. Qui s’est fourvoyé dans tous les pièges en se croyant plus fort que tous : les nazis qui l’ont interrogé, les partisans qui l’ont soupçonné, les Américains, les policiers français, les juges professionnels, les jurés populaires. Qui les a étourdis de mots, de dates, de faits, en brouillant chaque piste. Qui a passé sa guerre puis sa paix, puis sa vie entière à tricher et à éviter les questions des autres. Puis les miennes.

Le salaud, c’est le père qui m’a trahi. » (lire la suite)